Je Fume - Aurèle

Ce soir, bizarre, voilà qu'je fume,
Y a quelque chose qui brûle en moi,
Dans le noir, vos regards s'allument,
Vos yeux se posent sur mon émoi.

Qu'est-ce qui m'arrive, voilà qu'je fume
Sous la trappe de mes conduits,
Par mes pores et mes quais, des brunes
S'échappent et se mêlent aux bruits.

Ce qui m'étonne, c'est que je fume
Dans une zone où c'est interdit,
Les autr' consomment et j'me consume,
Comme le feu doux d'un paradis.

Tout ce brouillard, c'est moi qui fume,
Qui laiss' traîner ce voile gris,
De nulle part, de partout, j'hume,
J'ivresse, j'inhale et je ris.

Ne cherchez plus, c'est moi qui fume,
L'incandescence de mes aveux
Ne pèse plus qu'un poids de plume,
Quelle importance si je prends feu.

Comme toutes les femmes je fume,
Il n'y a qu'à m'allumer un peu.
Les hommes à flamme, je présume
Qu'il n'y a pas de fumée sans eux.

Comm' toutes les flammes à prendre,
Fleur au c?ur jaune, pétales bleus,
Je redout' les larmes de cendre,
Les pleurs d'ozone, et quand il pleut.

Ce soir, trop tard, c'est fait, je fume,
Je vous enfume et je m'en fous.